Exclure l’écriture ‘inclusive’

Billet d’humeur

Le 30 octobre 2023, le Président de la République inaugurait son petit « projet culturel présidentiel » à lui : la Cité internationale de la langue française, hébergée dans le chateau rénové de Villers-Cotterêts, dans le Valois.

L’ordonnance éponyme – toujours en vigueur – qu’y signa en 1539 le roi François Ier (1498-1547) consacra le français comme langue officielle exclusive pour les actes juridiques et administratifs dans notre pays (1).

L’ordonnance royale dite de Villers-Cotterêts (1539)

Je suis toujours heureux lorsqu’on restaure notre patrimoine, et la France y a plutôt bien réussi, après des décennies de vandalisme (qui continue toujours ici et là).

Je suis en revanche sceptique sur l’utilité d’une énième ‘Cité’. La langue française n’a pas besoin d’un musée, encore moins d’un mausolée (surtout lorsque les caisses publiques sont vides, les impôts asphyxiants, et la dette abyssale), mais d’être honorée, exaltée, magnifiée par ses écrivains et ses locuteurs, et surtout respectée par ceux qui la pratiquent dans l’espace public : médias, publicité, politiques.

Il est cependant un propos du discours présidentiel qui n’a pas manqué de rassurer les amoureux de notre langue : c’est sa condamnation implicite de l’écriture dite inclusive.

Implicite car, comme d’ordinaire, le Président ne craint rien tant que de s’aliéner qui que ce soit, en l’occurrence ceux qui saccagent notre langue, —cette peur de déplaire qui est sa marque de fabrique. Mais la critique est transparente, et certes à fleuret très moucheté, et elle n’a pas été démentie. Je le cite :

« il faut permettre à cette langue de vivre, de s’inspirer des autres, (…), de continuer à inventer, mais d’en garder aussi les fondements, les socles de sa grammaire, la force de sa syntaxe, et de ne pas céder aux airs du temps. Dans cette langue, le masculin fait le neutre. On n’a pas besoin d’y rajouter des points au milieu des mots ou des tirets ou des choses pour la rendre visible ». 

Car, voyez-vous, la langue française, selon certains, exclurait. Elle heurterait les sensibilités féministes et non-binaires.

Comme quand on dit, pas exemple, « L’homme est le plus grand prédateur de notre planète« . Beaucoup de femmes sont choquées par cette évidente discrimination.

Je plaisante, bien sûr.

Cette écriture inclusive gagne progressivement du terrain : administration, écoles, publicité, etc. souvent en catimini.

Le regretté Jean-François Revel avait écrit naguère : « Un humain de sexe masculin peut fort bien être une recrue, une vedette, une canaille, une fripouille ou une andouille. De sexe féminin, il lui arrive d’être un mannequin, un tyran ou un génie. Le respect de la personne humaine est-il réservé aux femmes, et celui des droits de l’homme aux hommes ? Absurde ! Ces féminins et masculins sont purement grammaticaux, nullement sexuels. »

Le Sénat a pris les choses tellement au sérieux qu’il vient de voter une proposition de loi l’interdisant. Souhaitons qu’elle aille jusqu’au bout.

Et si l’on arrêtait de tout déconstruire dans ce pays.

(1) Cette ordonnance est aussi, si l’on ose écrire, l’acte de naissance de l’état civil, car pour la première fois elle oblige les prêtres (premiers officiers d’état civil, et ce jusqu’à la révolution) à enregistrer notamment les naissances.

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