
« Toutes les tentatives de changer la nature de l’homme par des méthodes de Commissaire ont jusqu’à présent échoué, de l’État-Soleil de Spartacus à la Russie soviétique, en passant par l’Inquisition et la Réforme ». 1
Arthur Koestler, Le yogi et le commissaire. 1945
L’écrivain russe Evgueni Zamiatine, mort en exil à Paris en 1937, est surtout connu pour son roman Nous, publié en 1920 2, qui réinvente le genre du roman dystopique 3.
Nous est avant tout une critique transparente du premier totalitarisme moderne, le régime communiste créé par la révolution bolchevique d’octobre 1917, sans qu’à l’époque on pût en deviner le visage sinistre et hideux qu’il atteindrait à l’âge mûr, sous Staline. Ce livre exerça une influence sur les dystopies plus connues d’Aldous Huxley (Le meilleur des mondes, publié en 1932 – quoique Huxley niât avoir eu connaissance de Nous) et de George Orwell (1984, publié en 1949) 4.
Ce sont les communistes qui ont inventé le totalitarisme.
On a tendance à l’oublier, et sans doute, ils ont intérêt à ce qu’on l’oublie. Car ILS – et leurs avatars modernes – sont toujours là, avec la même volonté, le même but, sous d’autres noms, sous d’autres masques. Ils essaient aujourd’hui de vous faire croire qu’ils ont changé, ou qu’on ne les avait pas compris, ou que des déviance individuelles avaient fait dévier la Révolution de son cours.
Mais qui peut encore les croire ? À chaque fois que les communistes prennent le pouvoir, c’est pour de bon ; ils ne vous le rendent pas. C’est trop tard, le piège se referme sur vous…
Il n’y a pas de démocratie en régime communiste. La notion de « démocratie populaire » 5 est un cynique et sinistre oxymore.
Pour en sortir, il faut que le malheur des peuples – dont ils prétendaient les délivrer – atteigne son comble, et que le régime soit radicalement affaibli 6, comme en 1989 –1991, période d’intense sismicité historique, qui vit s’écrouler comme des quilles tous les régimes communistes à l’est de l’Elbe 7. Ou que des communistes fous soient délogés du pouvoir par des communistes plus raisonnables (ou moins fous), comme il advint lorsque l’armée vietnamienne renversa le régime sanguinaire des Khmers rouges en 1979 8.
Ce qui était clair et net il y a 30 ans l’est beaucoup moins aujourd’hui. Le communisme originel, version 1.0, se caractérise par un enrégimentement du peuple soumis à la dictature d’un parti unique, de son idéologie et de sa police, et un système économique, défini par la collectivisation généralisée des entreprises et la planification. L’aboutissement du premier, c’était la prison ; le résultat du second, l’égalité dans la pauvreté – sauf pour la caste des dirigeants du parti unique, la Nomenklatura, qui n’admettait les privilèges qu’à la condition qu’elle fût seule à en jouir.
Le communisme moderne, version 2.0, a lâché du lest. Il a mis de l’eau dans son vin rouge. Face à l’échec économique retentissant de sa version originelle (1.0), il lui a fallu muter. En faisant des concessions au système capitaliste honni. C’est la Chine du pragmatique Deng Xiao Ping qui a inauguré cette voie avec l’ouverture en 1979 de la première zone économique spéciale à Shenzhen, à quelques encablures de Hong Kong. Le village qu’elle était est devenu aujourd’hui une mégalopole de 18 millions d’habitants. L’injection d’une forte dose de capitalisme dans le moteur cassé du communisme a donné au régime communiste chinois une nouvelle vigueur. Beaucoup regardent avec admiration le réveil du géant chinois, dont Napoléon aurait prédit qu’il ferait trembler le monde 9 10.
Seule aujourd’hui, la Corée-du-Nord incarne le communisme ancienne manière (1.0), tellement obsédé par la crainte de perdre sa pureté qu’il s’est complètement coupé du monde.
Le génie de Zamiatine, c’est qu’il aperçoit dès 1920, soit moins de trois ans après la réussite du putsch de Lénine d’octobre 1917 contre le régime parlementaire qui avait renversé le pouvoir tasriste quelques mois plus tôt, les linéaments de ce nouveau type de régime politique – totalitaire donc -, qui est beaucoup plus et surtout autre chose que la « dictature du prolétariat » théorisée par Marx et Engels, et surtout par Lénine lui-même.
La dictature du prolétariat était censée n’être qu’une phase transitoire avant l’avènement du communisme, qui serait une société où, l’antagonisme de classe ayant disparu, l’Etat ne serait plus nécessaire. Avant cette « parousie » terrestre, l’État, dont s’est emparé le parti communiste, avant-garde du prolétariat, est l’outil qui permet à ce dernier de liquider les forces de résistance au nouveau régime : bourgeoisie, koulaks 11, etc., qui doivent se soumettre ou être éliminés. C’est ici que réside la première virtualité totalitaire du régime nouveau.
La dictature du prolétariat est, de fait, celle du parti communiste, qui évince toute force politique concurrente. Comme, en outre, la classe bourgeoise ne consent pas de bon gré à son abaissement, il y a des résistances, que le pouvoir communiste se juge légitime à réprimer. Très vite, c’est la guerre civile (les rouges contre les blancs, mais aussi d’autres factions), qu’exacerbent les interventions étrangères (dont la France 12, le Royaume-Uni, etc.). Plus aucune retenue ou scrupule n’est de mise pour mater les ennemis de la révolution. Fin 1917 est créée la Tchéka, toute-puissante et impitoyable police politique dirigée par Félix Dzerjinski, dont l’effectif atteint les 280 000 agents début 1921, et qui déchaîne en 1918 la « terreur rouge » (krasnyï terror) contre les contre-révolutionnaires, écho troublant de celle qui s’abattit sur la France sous la Convention jacobine, en 1793-1794 .
La machine à tuer procède de la prétention à incarner seul le Bien, à vouloir créer un Homme Nouveau. Ce mécanisme est universel et de tous les temps. Dans un roman génial, Les Dieux ont soif (1912), Anatole France dépeint Paris sous la Terreur, saisie par l’ivresse du meurtre idéologique, visant tous ceux qui n’adhèrent pas à la Révolution dans sa version robespierriste, les « ennemis du peuple ».
A la suite de Lénine mort en 1924, Staline, qui évince Trostski 13 et s’approprie pour lui seul le pouvoir suprême en 1929, parachèvera la construction de cet Etat totalitaire, dont une particularité est aussi de dévorer ses enfants, par vagues successives, comme on l’a vu sous la Terreur de 1793 14, lors des grandes purges des années 1936-38 en URSS 15, les grands procès d’après-guerre dans les démocraties populaires 16, en Chine pendant la Révolution culturelle, sous le régime des Khmers rouges, etc.
Nous se présente sous forme d’un journal écrit dans un futur lointain à l’intention des habitants de planètes à conquérir par l’Etat unique. On devine que cet Etat se confond avec la planète entière, sauf pour les territoires qui se trouvent au-delà du Mur Vert. Le narrateur n’a pas de nom, mais, comme tous les habitants de l’Etat unique, seulement un numéro – D-503, qu’il porte inscrit sur une plaque d’or sur la poitrine. Les habitant portent un unif, un uniforme, et se déplacent en rangs et au pas.

L’Etat unique a un chef le Bienfaiteur, une police, les Gardiens, mais il ne semble pas qu’il y ait de parti unique, ni d’idéologie claire. L’idéologie, si c’en est une, c’est de dispenser le bonheur en abolissant la faim, mais aussi la liberté et même l’amour, et en dissolvant l’individualité – le moi -, dans l’être collectif – le nous (« nous constituons un seul organisme aux millions de cellules »). D’où le numéro, l’uniforme, la marche en rang et au pas, la « Table des Heures » qui régit et uniformise l’emploi du temps de chacun 17, ne leur laissant que quelques « Heures Personnelles » (de 17 à 18h et de 21 à 22h), les habitations, certes individuelles, mais en verre, donc transparentes pour que rien ne soit caché aux yeux d’autrui et des Gardiens, l’obligation de chanter à heure fixe l’Hymne de l’Etat unique, « le Jour de l’Unanimité », etc. L’Etat unique a aboli le couple, la famille et la « propriété privée » des enfants (Sparte offre un lointain antécédent). Une « Lex Sexualis » permet à chacun de choisir un ou des partenaires sexuels adaptés « aux hormones de son sang », et de se rencontrer au moyen d’un « carnet rose à souche », lors des « jours sexuels ». Il est alors licite – rare concession au concept bourgeois de l’intimité – d’abaisser le rideau de son logement de verre !
Le but de cette société est d’être si mathématisée, réglée et régulière, parfaite en un mot, que « l’idéal sera atteint lorsque rien n’arrivera plus ». L’homme y est délivré de la liberté, de la diversité, de l’imprévu, du hasard, sources d’incertitude, de tourment, de désordre, et même de crime. Mais aussi de l’envie, car avec l’égalité parfaite qui semble régner dans l’Etat unique, « les raisons d’envier le prochain ont disparu ». Même si l’auteur est peu disert sur les aspects économiques de ce régime – peut-être par peur d’une allusion trop explicite au régime bolchevique qui l’exposerait à la censure (le livre n’y échappa pas cependant).
Le visage répressif de l’Etat unique est évoqué avec une relative parcimonie, jusqu’au chapitre final… La surveillance policière s’incarne sous les traits de S-4711, un personnage voûté, aux oreilles en forme d’ailes, et aux yeux comme des vrilles. Il y a aussi les membranes de rue, qui épient les conversations. Il me semble que l’auteur veuille souligner ce résultat remarquable de l’Etat unique, qui est d’avoir fait intérioriser le conformisme, et l’obéissance. Un Etat totalitaire parfait est celui où la contrainte extérieure a d’autant moins à s’exercer qu’elle est davantage intériorisée. Il est ainsi peu question d’éducation et de propagande dans Nous, c’est à dire des moyens par lesquels ce catéchisme de la soumission est inculqué aux numéros.
Un roman dystopique serait vite fastidieux s’il ne comportait ce qui en fait, selon certains auteurs 18, la caractéristique majeure, et lui donne son sel : la rébellion du personnage central contre l’ordre établi, souvent intriquée à une intrigue romantique. On songe à Winston Smith dans 1984, à Neo dans Matrix, ou encore à Copeau dans Un bonheur insoutenable d’Ira Levin (1970 19). Le personnage central (qui n’a rien d’un héros) de Nous est le narrateur, D-503, qui, en tombant amoureux (ce qui est prohibé) de la rebelle I-330 – membre des Mephis, le peuple qui habite au delà du Mur Vert, devient tiraillé entre son allégeance à l’Etat unique, et les pensées subversives qu’il sent monter en lui.
Je ne dévoilerai pas l’épilogue. Pour moi, le livre a plus d’intérêt par la prescience de Zamiatine, sa contribution à l’invention de la dystopie moderne, sa dénonciation de l’utopie 20 que la Raison veut instaurer pour faire le bonheur de tous même contre leur gré 21, et de l’illusion que l’histoire a un sens, que par ses qualités proprement littéraires. L’intrigue manque de relief, le propos est parfois si elliptique ou le style si allégorique que le sens en devient obscur (peut-être la traduction plus récente me conduirait-elle à nuancer cette appréciation). Il faut le lire comme invitation à la réflexion sur ce qu’est un Etat totalitaire 22.
Le danger totalitaire que Zamiatine dénonce dans Nous n’a pas disparu avec la chute du régime qui en inspira l’écriture. Le communisme est toujours là, animal blessé mais toujours vivant, tapi, guettant son heure. Il s’est revêtu de nouveaux oripeaux, et ses zélotes ont changé d’étiquette, pour déjouer notre vigilance et notre mémoire. Sa force réside dans son habileté à stimuler le ressort de l’envie 23, cette « passion triste » 24 nichée au cœur de la psyché humaine. Tant que l’envie subsistera, elle pourra servir de levier politique aux communistes et leur promesse d’égalité sera désirable pour tous ceux qui se sentent déchus, déclassés, ou tout simplement moins riches que les riches, dont on nous serine encore la vilenie intrinsèque dans la France d’aujourd’hui 25.
L’Etat unique du roman de Zamiatine a réalisé l’égalité parfaite, neutralisant à la source « les raisons d’envier le prochain » (encore qu’il susbiste des différences physiques et psychologiques entre les numéros, c’est à dire des raisons possibles d’envier toujours…). Mais ce que Zamiatine n’a pas vécu assez longtemps pour voir, c’est que l’Etat unique est une chimère. Le communisme 1.0 a échoué et ne pouvait qu’échouer au terme d’un chemin jonché d’immenses et atroces souffrances. Le communisme relooké à la chinoise, version 2.0, a corrigé l’un des vices du modèle initial. Ce n’est plus l’égalité dans la pauvreté. Il y a moins de pauvreté et il n’y a plus d’égalité. Mais il reste une prison, perfectionnée par des avancées technologiques, comme Zamiatine ne pouvait les anticiper (la reconnaissance faciale permise par l’intelligence artificielle, par exemple). Pour l’instant, le peuple chinois, qui n’a jamais connu (comme les Russes) l’air vivifiant de la liberté, semble s’en contenter tant que le régime réussit à satisfaire ses appétits de consommation et à le convaincre par d’indéniables succès que la Chine est en passe de redevenir la grande puissance qu’elle fut. Mais qui prévoyait en 1989 que l’empire soviétique s’effondrerait en quelques années ?
Le meilleur moyen d’échapper au totalitarisme ? Déchirer le voile sous lequel se dissimulent les avatars modernes du communisme 26, et ne jamais les laisser s’approcher du pouvoir. Car après, il est trop tard. Mais tant que l’envie 27 agira – et le déclin du christianisme qui la réfrénait semble lui laisser libre cours -, on peut craindre que les prophètes de l’égalité continuent d’attirer le chaland…
Notes :
- Texte original : « all attempts to change the nature of man by Commissar methods have so far failed, from Spartacus’ Sun State through the Inquisition and the Reformation to Soviet Russia ». Le « Commissaire » dont il question ici est le commissaire politique soviétique. ↩︎
- Le manuscrit fut publié tout d’abord à New York en 1924. Je l’ai lu la première fois en 1986, pendant mon service militaire, dans la traduction de B. Cauvet-Duhamel, de 1971 sous le titre Nous autres. Le livre a fait l’objet d’une nouvelle traduction en français, en 2017, avec son titre actuel, par Hélène Henry. Nous a finalement été publié en Union soviétique en 1988. ↩︎
- Une dystopie est une oeuvre littéraire de fiction, décrivant, le plus souvent dans un futur proche ou lointain, et dans un espace déterminé ou non, un état du monde oppressant (souvent un régime d’oppression totalitaire, mais les romans de René Barjavel, Ravages (1943) et de Michel Houellebecq, La possibilité d’une île (2005) sont des dystopies sans régime totalitaire), inspiré d’une réalité actuelle plus ou moins transfigurée.
Selon l’universitaire Jean-Michel Racault : « On date souvent des premières décennies du xxe siècle la naissance de l’antiutopie et particulièrement du lien entre le projet utopique et le danger totalitaire » (Source : ici).
Dans les grands romans dystopiques, l’auteur stylise, amplifie et extrapole certains traits d’un régime ou état du monde existant, ou explore ce qui n’y existe que comme virtualité. Par exemple, aucun régime totalitaire historique n’a poussé l’eugénisme au point extrême décrit par Huxley dans Le meilleur des mondes, où les humains sont sélectionnés et clonés. Dans aucun régime totalitaire historique, l’uniformité, l’effacement de toutes différences entre humains n’a atteint un degré tel que dans Nous autres. Dans aucun régime totalitaire historique, la langue n’a été reconstruite et instrumentalisée comme dans le 1984 d’Orwell (inversion du sens des mots). La réécriture du passé, en revanche, si elle est poussée à l’extrême dans le roman d’Orwell, n’est pas une invention. Staline s’y est livré allègrement (même avec les photographies) et dans l’Egypte des pharaons (Akhenaton !), la Rome antique (Marc-Antoine et Néron parmi tant d’autres), mais aussi encore dans la Venise des Doges (le doge Marino Faliero au 14e siècle), on pratiquait la « damnatio memoriae », qui était moins la réécriture du passé que l’effacement du souvenir et de la trace de personnages considérés comme traîtres à la patrie ou à la religion acceptée.
L’objet d’une dystopie est de dénoncer un régime existant et/ou d’alerter sur les dangers de telle évolution ou virtualité historique. Ces deux aspects sont réunis dans le roman de Zamiatine, qui, selon Philip Stoner, « est largement considéré comme la naissance de la dystopie moderne. « Nous » a influencé l’utilisation de la littérature dystopique comme commentaire politique en l’utilisant comme vecteur d’analogie directe avec le système politique russe existant sous Lénine ». Source : ici
Pour le philosophe britannique contemporain, John Gray : « le thème central de la fiction dystopienne est la révolte des passions humaines contre l’ordre totalitaire ». The new Leviathans. 2023. ↩︎ - Orwell publia un recension du livre en 1946 : texte ici (en anglais). ↩︎
- Dénomination des pays d’Europe centrale et orientale libérés par l’Armée rouge (de l’URSS) en 1945, et qui furent contraints d’adopter des régimes de type communiste affiliés à Moscou. ↩︎
- D’où les tentatives de réforme de Mikhaïl Gorbatchev, à partir de 1985. Mais comme l’analysa Alexis de Tocqueville à propos de la monarchie française de 1789 : « le moment le plus dangereux pour un mauvais gouvernement est d’ordinaire celui où il commence à se réformer ». L’Ancien régime et la Révolution. 1856. Entreprendre de se réformer pour ce type de régime, c’est au fond avouer ses vices de construction, après s’être longtemps présenté comme le régime parfait. ↩︎
- Dans son dernier chef-d’oeuvre, Le passé d’une illusion (1995), François Furet (1927-1997), brillant historien et académicien et… ex-communiste repenti (il rompit avec le parti en 1959), écrit : « Le régime soviétique est sorti à la sauvette du théatre de l’histoire, où il avait fait une entrée en fanfare. » ↩︎
- C’est cependant un ex-Khmer rouge, Hun Sen, qui, arrivé dans les valises de l’armée vietmanienne, exerça presque sans interruption et sans partage le pouvoir au Cambodge, et le tient toujours de facto, même s’il n’est plus que président du Sénat depuis 2024. ↩︎
- Le propos complet serait « Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera » ; il est probablement apocryphe, mais a été repris par Alain Peyrefitte pour en faire le titre de son livre sur la Chine, publié en 1973. ↩︎
- La Chine actuelle – celle de Xi Jinping – est-elle encore totalitaire ? J’y reviendrai. ↩︎
- Les koulaks étaient les paysans riches ou possédant en Russie. ↩︎
- Le futur général de Gaulle fit partie d’une mission militaire française qui aida les forces polonaises du Maréchal Pilsudsky à remporter une éclatante victoire contre l’Armée rouge en août 1920. ↩︎
- Qu’il fera assassiner, à Mexico, lieu de son ultime exil, par Ramón Mercader, en août 1940. ↩︎
- Par exemple, Camille Desmoulins et Danton, condamnés à mort par le Tribunal « révolutionnaire » (institué en mars 1793 « pour punir les ennemis du peuple »), et guillotinés le 5 avril 1794. ↩︎
- Episode également dénommé « Grande Terreur », qui fit au moins un demi-million de victimes. Parmi les victimes les plus notables des grands procès de Moscou : le Maréchal Mikhaïl Toukhatchevski et Nikolaï Boukharine. ↩︎
- Procès de László Rajk en Hongrie (1949) et de Rudolf Slánský en Tchécoslovaquie (1952). ↩︎
- Le seul personnage réel que cite le roman est Frederick Winslow Taylor (1856-1915), l’inventeur du taylorisme, l’organisation scientifique du travail… en régime capitaliste. En quoi Nous est plus qu’une dénonciation du régime communiste. ↩︎
- Comme John Gray, cf. citation dans la note 2. ↩︎
- On retrouve dans le titre anglais, This perfect day, cette idée obsessive de la perfection souvent associée au projet totalitaire. ↩︎
- Le philosophe franco-russe Nicolas Berdiaeff a consacré des pages très puissantes aux dangers de l’utopie dans son livre De l’esclavage et de la liberté de l’homme (1946)(lien : ici). Citation : « L’utopie implique toujours l’intention d’une organisation totalitaire de la vie ». ↩︎
- Point souligné par John Gray, dans un article publié dans le New Statesman en 2021. « Nous a la particularité de lier le monde inhumain qu’il dépeint à ce que beaucoup considèrent comme l’attribut humain déterminant – le pouvoir de la raison de remodeler la société. L’objection de Zamyatin aux utopies n’est pas qu’une société parfaite est irréalisable. C’est l’idée même de perfection qu’il rejette. Pour lui, la poursuite obstinée d’un modèle rationnel de société aboutit à la tyrannie. Mais ce n’est pas la répression politique qui le préoccupe le plus. Il était davantage préoccupé par l’impact du rationalisme sur l’âme. La créativité humaine est inextricablement liée à des passions perturbatrices. Les projets utopiques sont dystopiques par nature. » ↩︎
- L’adjectif aurait été inventé dans l’Italie fasciste du début des années 20, dans un sens à la fois péjoratif ou positif selon ses utilisateurs. ↩︎
- Dans ce sens du dictionnaire Le Robert : « Sentiment de désir mêlé d’irritation, de dépit qu’éprouve qulequ’un contre la personne qui possède ce qu’il n’a pas. Désir de jouir d’un avantage, d’un plaisir égal à celui d’autrui. » ↩︎
- Expression attribuée à tort à Spinoza, et qui existait dans la langue française avant la parution de l’Ethique, par exemple chez le poète Pierre Le Moyne. ↩︎
- Il y a même un Rapport sur les riches (annuel). Source : ici. Devinez quel peut en être l’objectif ? Si vous croyez qu’il s’agit d’augmenter la prospérité de tous par l’excellence, l’éducation et l’innovation, vous êtes bien naïfs… ↩︎
- La menace totalitaire n’est pas l’apanage des seuls communistes, crypto-communistes et leur cohorte de « compagnons de route ». Il faudrait, pour être complet, évoquer aussi celle que représente l’Islam radical. Dans ce sens, cf. entre autres les écrits d’Alexandre del Valle (Le totalitarisme islamiste à l’assaut des démocraties, 2002), de Zineb El Rhazoui (Détruire le fascisme islamique, 2016), etc. Quant au risque de résurgence d’un totalitarisme brun ou noir (par références aux couleurs des uniformes ou chemises des nazis ou fasciste italiens), je ne l’aperçois pas aujourd’hui. Le risque est davantage celui de régimes plus ou moins autoritaires. On n’entend plus guère aujourd’hui la prétention de créer un « Homme Nouveau » (dont Lénine parle dès 1919), typique des totalitarismes originels. L’endoctrinement et le contrôle des esprits sont par ailleurs plus difficiles à réaliser dans un monde de plus en plus ouvert, où l’information circule, même dans ces pays où la presse est muselée, et les réseaux sociaux fortement surveillés et certains interdits. ↩︎
- Sur l’envie, le philosophe-économiste Hans-Hermann Hoppe (à l’un des livres duquel je consacre un article sur ce blog) a écrit cette remarque acide mais je crois assez pénétrante : « les intellectuels souffrent, presque congénitalement, d’une image de soi très exagérée et sont donc toujours enclins à l’envie et deviennent facilement des promoteurs avides de l’envie ». ↩︎
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