Wokisme : le devoir de résister

L’ intervention récente de Matthieu Bock-Côté sur le wokisme est une perle (lien)

Matthieu-Bock Côté est ce sociologue québécois courageux, talentueux et combatif, régulièrement invité sur les médias français, et ennemi déclaré (et redouté) du gauchisme de tout poil. 

Son exposé sur le wokisme est remarquable, de clarté et de vigueur. Mais qu’est-ce donc que ce wokisme, du mot anglais woke, éveillé ? C’est le nom générique d’une mouvance idéologique composite issue à l’origine des campus universitaires américains. Son intention : abolir la civilisation occidentale jugée toxique, et recréer un nouvel humain purgé des tares de cette civilisation, — et c’est ce projet délirant et dangereux qui doit nous interpeller et nous mobiliser pour le combattre. 

Cette hydre a plusieurs têtes. 

Répertorions-en quelques-unes parmi les plus marquantes (ou les plus laides, selon le goût) : il y a le décolonialisme ou racialisme, qui réintroduit la catégorie des races dans la vie politique et sociale, et en réalité fait renaître le racisme sous couvert d’antiracisme. Selon cette théorie, le vilain c’est le blanc, surtout si c’est un homme hétérosexuel, riche et bedonnant (et carnivore). Il faut exalter les minorités, au nom de la “diversité », qui seule est belle et légitime. A l’intégration il faut préférer le “multiculturalisme ». Le “racisme systémique” est omniprésent surtout lorsqu’on le nie, et toutes les institutions et valeurs occidentales (y compris notre mathématique !) contiennent des traces de “suprématie blanche”. Il faut donc les déconstruire1, et parfois les déboulonner, au sens propre du terme comme pour les statues. Je renvoie au livre récent et sidérant de Matthieu Bock-Côté2 pour plus de détails.

Il y a aussi la « théorie du genre », selon laquelle il n’y a pas de femme ou d’homme, de père ou de mère, seulement des identités fluides que chacun a le droit de choisir et d’endosser comme le vêtement qui lui sied le mieux.  L’écriture dite “inclusive” est fille (si l’on ose écrire) de ce délire.

Les wokes sont d’une intolérance folle, maniant sans retenue l’invective, l’excommunication et la censure (ce qu’on appelle aussi la “cancel culture”, culture de l’effacement), et n’ayant que mépris pour ce que nous considérons comme des axiomes de nos démocraties : le respect du contradicteur, le débat, la liberté d’expression. Retournant à son avantage la phrase de Saint-Just, le woke proclame : « pas de liberté d’expression pour les ennemis du wokisme” —toute objection est assimilée à un “discours haineux”

Le malheur est que cette idéologie gagne du terrain, car elle se déploie parfois à couvert, parfois à grand renfort d’intimidation, parfois encore parce que c’est la mode. Pour la journaliste franco-américaine Anne Fontaine, qui vient de lui consacrer un livre : « C’est tout le problème du woke ; il est pavé de bonnes intentions« 3. Pour Bock-Côté, c’est une “forme d’impérialisme culturel américain”, qui conduit à un « régime autoritaire qui ne dit pas son nom » dans l’entreprise, à l’université, dans les administrations, et même … à la maison (en Ecosse, le ministre Humza Yusaf avait envisagé un temps de criminaliser les déviances en créant un droit à la délation des propos anti-woke). 

Pour résister, il faut d’abord prendre conscience du phénomène derrière le vernis de progrès sous lequel il avance souvent masqué, et ensuite confronter cette idéologie partout où elle étend ses métastases. Cela suppose du courage…

Notes :

  1. Les critiques du wokisme y reconnaissent une influence intellectuelle française (« French theory ») assez nette : les théories de la déconstruction de Derrida, Foucault, etc. ↩︎
  2. Matthieu Bock-Côté. La Révolution racialiste et autres virus idéologiques. La Cité, 2021 ↩︎
  3. Anne Fontaine. Wokisme, La France sera-t-elle contaminée ? Editions du Rocher, 2022. ↩︎

4 réponses à « Wokisme : le devoir de résister »

  1. […] Et il y a enfin ce ver qui nous ronge de l’intérieur, qui sape nos institutions et nos valeurs, notre histoire, nos oeuvres, nos auteurs, et même notre mathématique, et qui n’est pas autre chose qu’une Guerre contre l’Occident, selon le titre du dernier livre (brillant et incisif) de l’essayiste britannique Douglas Murray (4), —c’est à dire le délire woke, sur lequel j’ai écrit par ailleurs sur ce blog (lien). […]

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  2. […] totalitaires. Le wokisme en est une branche, comme l’une des têtes de l’hydre (cf. mon article sur ce […]

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  3. […] dès les années 1980, c’est la déferlante wokiste, sur laquelle j’ai écrit par ailleurs. Avec le wokisme, émerge une idéologie anti-occidentale radicale, qui fait de l’homme blanc […]

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  4. […] constituent un autre type de menace pour l’indépendance de la France. Le wokisme (cf. mon article) et l’islamisme (cf. mon article) ont fortement progressé en France dans la période […]

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